J’interviens en pointillé dans l’émission Mauvais Genre sur La planète Sade, Samedi 22 février 2014 (de 22h à minuit) sur France Culture. La question était de savoir si Sade avait eu une influence au Japon. Non et oui mon colonel.
Non, je n’ai jamais vu aucun club, ni aucune dominatrice japonaise porter un nom qui fasse allusion ni à Juliette, au château de Silling, Marquise de cela ou DAF de ceci… Ainsi que me le confirme Akira Igarashi, rédacteur en chef de WebSniper (le Facebook des sado-masochistes japonais), « Les Japonais savent que le mot sadisme vient du nom de Sade, mais ils ne l’ont pas lu et se sentent peu concernés par cette réflexion portant sur la liberté religieuse, morale et philosophique. Pour eux, le SM relève juste du divertissement érotique et n’a donc aucun rapport avec Sade. » Le seul et unique club SM qui fasse référence à Sade, à Tokyo, s’appelle Justine et… c’est une maison pour adult baby.
Sade est donc peu connu au Japon, sinon comme celui à cause de qui le traducteur Shibusawa a affronté la justice au cours d’un procès fleuve de 10 ans… à peine trois ans après que Pauvert ait affronté lui-même la justice en France ! Pour toute une frange d’intellectuels et d’artistes d’avant-garde japonais, dans les années 60-70, Sade offre (avec Lautréamont, Bataille, Breton, etc), une forme d’alibi permettant -sur le territoire japonais- de justifier la mise en scène du sexe et de la violence. On se réclame de Sade, parce que cela fait chic de citer des auteurs français, et aussi parce que Sade est devenu très populaire au moment du Sado Saiban, le « Procès Sade » au cours duquel il a fallu que les juges définissent la notion d’obscénité (waisetsu). Cette notion floue permet encore de nos jours, au nom de l’article 175, d’interdire toutes les représentations réalistes de sexe dans le domaine des images animées – cinéma, animation, jeux vidéos.
Presque tous les romans de sade sont traduits en Japonais :
Justine ou les Malheurs de la vertu, publié en 1791 (version augmentée du conte Les Infortunes de la vertu, rédigé en 1787) : 美徳の不幸 : dôtoku no fukô (Infortunes de la vertu).
La Philosophie dans le boudoir, publié en 1795 : 閨房哲学 : keibô tetsugaku (Philosophie de la chambre à coucher).
Les Crimes de l’Amour publiée en 1800 : 恋の罪, koi no tsumi (le péché de l’amour)
La Nouvelle Justine, suivi de l’Histoire de Juliette, sa sœur (également titré Histoire de Juliette, ou les Prospérités du vice), publiées du vivant de Sade en 1799 : 新ジュスティーヌ : atarashii Justine et 悪徳の栄え : akutoku no Hae.
Les Cent Vingt Journées de Sodome, ou l’École du libertinage, écrite à la prison de la Bastille en 1785 : ソドム百二十日 : sodomu hyakuniju nichi ou encore 淫蕩学校 : intô gakko (littéralement : « l’école de la lubricité »)…
La planète Sade – Sade au Japon. Samedi 22 fev. 2014 De 22h à minuit