La figure de la « femme-enfant immature » comme objet de désir au Japon date des années 1980, au moment même où l’indépendance nouvellement acquise des femmes japonaises provoque, par réaction, un report de la libido en direction de partenaires immatures. C’est la période qui voit apparaître les manga avec des filles chô-kawaii (super-mignonnes) : grands yeux, petit menton. Le succès de ces artistes volontairement sélectionnées dans la catégorie « immature » attire l’attention des médias occidentaux qui omettent généralement de signaler l’existence de phénomènes similaires en Occident (compétitions de mini-miss, écoles de comédiens pour acteurs de 7 à 12 ans, succès de chanteuses nymphettes comme Britney Spears, etc). Le journaliste Arthur Bayon, se montre plus prudent : dans un long article publié pour la revue en ligne Slate, il prend la précaution de signaler ce fait que « Pour les autorités japonaises, le fait de se masturber sur des images mentales ou sur des êtres de fiction n’est pas condamnable. »
La pedopornographie (jidō poruno) est strictement interdite au Japon par un acte de loi daté du 18 mai 1999. Intitulé « Loi pour punir les actes liés à la prostitution des enfants et la pornographie enfantine, et pour protéger les enfants » (Jidō baishun, jidō poruno ni kakaru kōi tō no shobatsu oyobi jidō no hogo ni kansuru hōritsu), cet acte stipule qu’il est interdit de prostituer des enfants, de faciliter leur prostitution, ou de faciliter la production, l’importation et la distribution de pornographie enfantine, au Japon comme ailleurs.
En 2014, cet acte a été révisé et la possession de matériel pedopornographique a également été interdit.
Si le Japon a mis du temps à s’ajuster aux normes internationales, c’est probablement par refus de punir les personnes qui consomment des mangas ou des dessins animés. Au Japon, les législateurs ont fait bien attention de distinguer la pedopornographie réelle (photos et vidéos d’enfants en chair et en os) de ce que l’on pourrait appeler la pedofantasmagorie (images de synthèse, dessins, textes de fictions, reproductions en silicone ou en plastique, etc).
Les législateurs japonais ont par ailleurs pris le temps de rédiger un texte de loi précis punissant spécifiquement la possession de photos ou de vidéos montrant « tout enfant, entièrement ou partiellement nu, dont les parties sexuelles (organes génitaux ou zones de proximité, fesses et poitrine) sont exhibées et mises en scène afin d’exciter ou stimuler le désir ».
REFERENCE : « Ce que dit la sexualisation des adolescentes de la société japonaise » (Arthur Bayon), Slate, 11 juillet 2019.
Illustration : image extraite du clip « It Girl » de Pharrell Williams.