Le premier colloque international organisé par le groupe EMTECH portera sur mon axe de recherche et aura lieu à Berlin les 25 et 26 octobre 2019.
Titre : L’Attachement émotionnel aux machines : nouvelles façons de créer des liens au Japon
Argumentaire (résumé) : Au Japon, un nombre croissant d’interfaces issues des Technologies de l’Information et de la Communication (TC) sont spécifiquement conçues pour favoriser l’attachement : les robots émotionnels, les épouses holographiques, les petits amis à télécharger et les partenaires en réalité augmentée sont commercialisés à des prix toujours plus attractifs. L’attrait qu’ils exercent est tel qu’une frange non-négligeable de consommateurs affirme préférer ces formes de vie artificielles aux humains de chair et d’os. Défiant le stigmate qui frappe les amateurs de « mondes artificiels », ces hommes et ces femmes vont jusqu’à « épouser » publiquement leur personnage en « 2D » préféré lors de cérémonies de mariage simulé au cours desquelles ils et elles échangent des bagues et signent des faux contrats de mariage avec leur bien-aimé-e de fiction. L’industrie du jeu vidéo participe largement à l’essor de ce marché « de l’amour illusoire » (mōsō ren’ai) et, bien qu’il s’agisse d’un marché de niche, elle cible maintenant le grand public. Avec la prolifération d’appareils électroniques toujours plus innovants, ce phénomène d’attachement aux créatures artificielles est appelé à se développer davantage au Japon, ainsi que dans le monde. Comment ces nouvelles façons de créer du lien peuvent-elles être comprises et expliquées ?
Ce colloque international et interdisciplinaire s’intéressera à la manière dont l’être humain établit des relations intimes avec des « entités numériques émotionnellement intelligentes » (robots, hologrammes, etc.) et aux raisons pour lesquelles il s’engage dans une histoire avec elles. Suivant quelle logique ? Le fait-il par confort, en vue de s’épargner les vicissitudes d’une vie en compagnie des humains, ou dans un autre but ? L’un des objectifs du colloque sera d’élargir et d’ouvrir l’analyse du phénomène, afin d’éclairer la nature de l’« attachement artificiel » sous des formes moins naïves que celles qui contribuent toujours à faire débat. Les technologies qui favorisent des connexions émotionnelles entre humains et créatures numériques sont en effet perçues comme une menace. Et cela d’autant plus lorsqu’elles s’appuient sur la « simulation » (un mot que l’on confond souvent avec mensonge, tromperie ou fraude). Ces technologies sont fortement soupçonnées de porter atteinte à l’identité sexuelle des humains ou de menacer les liens sociaux.
L’impact de ces technologies sur les structures traditionnelles de la famille et de la société sera également exploré. Les relations intimes avec des machines favorisent-elles la désaffection pour des contacts « dans la vraie vie » avec de vraies personnes ? Ces relations sont-elles facteur d’isolement ou, au contraire, de soutien social ?
D’autres questions seront abordées : quel est le profil des personnes qui investissent du temps et de l’énergie dans des relations romantiques avec des créatures numériques ? Comment se perçoivent-elles, comment s’identifient-elles et interagissent-elles en société ? Suivant quelles stratégies commerciales les fabricants d’interfaces émotionnelles (jeux vidéo, logiciels, gadgets électroniques, robots, etc) mettent-ils au point leurs produits et leurs campagnes ? Quelles règles président à la fabrication des entités les plus populaires (aimables) ?
Pour finir, le colloque portera aussi sur l’étude des technologies qui facilitent les relations entre humains, telles que les technologies de la réalité virtuelle.
Date-limite de soumission des propositions : 14 juin 2019. Réponse : 14 juillet 2019.